Les BienFaits du peau à peau
LES BIENFAITS DU PEAU A PEAU
Ne coupez pas le cordon trop vite : gardez une proximité physique avec votre bébé !
On sait que, dès la naissance, le contact rassure la mère et l’enfant. On décrit chez tous les petits mammifères un "cri de détresse à la séparation" (SDC = separation distress call) qui s’apaise dès que le contact physique avec la mère est rétabli.
En fait, on peut dire, avec le Dr Bergman, que l’"habitat" naturel du bébé après la naissance, c’est le corps maternel. Quand on le sépare de cet « habitat », il a, comme tous les petits mammifères, cette « réaction de protestation-désespoir », qui aide à la survie en diminuant la dépense énergétique et la croissance, via une diminution du rythme cardiaque et de la température corporelle et une augmentation massive de la production d’hormones du stress. Une fois que la mère et le bébé sont réunis, le rythme cardiaque et la température corporelle du bébé remontent et les hormones du stress diminuent (des études ont montré que le contact peau à peau entre la mère et son bébé réduit la production d’hormones du stress de 74 %.).
Cette proximité physique, ce contact peau à peau peuvent exister même sans allaitement au sein, bien sûr. Mais étant donné la valorisation dans notre culture d’un maternage « distal » plutôt que « proximal », les bébés allaités au sein ont beaucoup plus de chances de bénéficier de cette proximité que les bébés nourris au biberon. Car le sein ne peut être donné à distance, contrairement au biberon qui peut l’être à distance de la longueur du bras (voire sans présence humaine quand on arrive à « caler » le biberon pour que le bébé le boive tout seul).
Difficultés d’installation par rapport au matériel employé
Actuellement, nous demandons aux parents d’enfiler un jersey tubulaire sur le torse nu (les mères choisissant de garder ou non leur soutien-gorge) à la manière d’un bustier avant de remettre par-dessus leur blouse de service. Nous les installons le plus confortablement possible dans un fauteuil et glissons leur bébé en couche culotte dans le jersey. L’enfant y est ainsi maintenu en position orthostatique contre le thorax de son parent. Malheureusement le jersey employé se détend et le risque est que l’enfant “glisse” et se retrouve lové en boule sur le ventre du parent qui n’ose pas toujours attraper son enfant pour le réinstaller.
Difficultés d’installation par rapport au temps passé en “kangourou”
De 1 à 3 heures ou plus : le personnel présente encore malheureusement le temps du “kangourou” de façon inhomogène et personnelle à chaque soignante. Il existe les partisanes du “autant que vous voulez”, celles du “une heure minimum pour que l’enfant profite de cette séance” et celles du “deux ou trois heures minimum sinon ce n’est pas la peine”. Et certains parents renoncent parfois faute de temps.
Difficultés d’installation par rapport au moment idéal pour le “kangourou”
Les parents doivent être disponibles mais également les soignants. Et nous restons à la merci d’une entrée ou d’une urgence. Certains parents préfèreraient faire du peau à peau le matin : là aussi il y a souci d’organisation entre les différents acteurs (la toilette, la visite du pédiatre, parfois le kinésithérapeute et les parents).
Difficultés d’installation par rapport à la structure du service
Notre service entièrement vitré et non muni de stores peut devenir une gêne pour certains parents. Nous avons mis en place un système de draps pour isoler le parent du regard des autres.
Difficultés par rapport aux bébés pouvant être mis en “kangourou”
Nous hésitons très fréquemment à mettre en “kangourou” des enfants ayant une perfusion périphérique précieuse (épicrânienne ou enfant très difficile à perfuser). Nous avons aussi vécu le cas d’une escarre suite à une séance avec un abord périphérique. Les enfants sous oxygénothérapie nous font aussi de temps en temps hésiter car ils demandent un temps d’installation assez long et une surveillance accrue avec monitoring.
Difficultés par rapport au matériel nécessaire à l’enfant
Monitorage, saturation en oxygène sont-ils nécessaires aux enfants ne présentant pas ou rarement d’apnées, de bradycardies ou de désaturations, la stimulation cardio-respiratoire “naturelle ” du peau à peau étant bien démontrée. Est-ce à la puéricultrice ou à l’infirmière qu’incombe le choix de laisser ou non un monitorage ou est-ce une prescription médicale après consensus de l’équipe ? La majorité des soignants est pour un arrêt du scope pendant la mise en peau à peau (si l’enfant est stable depuis longtemps) parce que le scope peut inquiéter le parent qui surveille le tracé plutôt que d’être tout à son enfant. De même, faut-il fixer un poids en dessous duquel une couverture serait mise systématiquement en plus du jersey ?
Quelle autonomie pouvons-nous laisser aux parents ?
A partir de quel moment pouvons-nous et devons nous laisser les parents seuls pour installer leur enfant en “kangourou” ? Il n’est pas facile de ne pas tirer la sonde gastrique, les divers fils, faire attention à une perfusion... ; d’un autre côté cela permet aux parents de développer leur autonomie.
Les mises en peau à peau sont aussi un moment d’échanges privilégiés entre le soignant et les parents qui, plus détendus, s’expriment parfois plus facilement. Laisser le parent gérer le “kangourou” pourrait réduire cette relation avec l’équipe soignante.
Difficultés provenant des enfants
Durant cette étude, nous avons été obligés d’arrêter les mises en peau à peau pour 2 enfants. Ceux-ci, malgré le grand désir des parents de continuer et notre vigilance lors de leur installation, se détendaient et s’endormaient si profondément qu’ils désaturaient de façon importante et prolongée avec des apnées nécessitant de fréquentes et vigoureuses stimulations de notre part, ce qui nous amène à nous montrer plus vigilants lors des premières installations car nous ignorons quels enfants sont “inaptes” au “kangourou”.
Pour conclure, nous ajouterons que cette méthode de portage associée à une prise en charge globale de la douleur et du confort avec différents moyens (l’administration de sucre, la crème Emla, le cocon...) nous permet d’offrir aux nouveau-nés et à ses parents des soins de meilleure qualité. Nous avons ainsi pu développer une écoute plus juste des parents, de leurs attentes et angoisses tout en restant vigilants afin de ne pas rendre obligatoire ce mode de relation. Le choix de la mise en “ kangourou” appartient aux parents et à leur bébé.